Froid dans les os. Mais pas trop. Une goule, donc.
Un infime sourire froid passa sur les lèvres de Philippe lorsqu'il répondit de sa voix atone d'enfant :
- M'occuper de votre cas ? Ah... J'aimerais beaucoup...
Il observa d'un oeil critique le bandage et la situation de la blessure, estimant que si ça avait été le cas, il aurait été plus propre et plus efficace. En plus, il n'avait jamais eu l'occasion d'étudier une goule. Il aurait aimé pouvoir l'approcher avec sa sacoche professionnelle et le droit de l'utiliser...
Il chassa les images agréables qui venaient le distraire, et, vu que la blessure ne semblait pas guérie, il demanda sur le ton de la conversation :
- Plus de sang pour vous soigner, ou vous économisez...?
Il sortit ensuite un carnet de sa poche arrière de jean, ainsi qu'un bout de crayon usé. Il tourna quelques pages et se posa.
- Bon. On va commencer par votre nom. Vous vous appelez comment...?
Le petit primogène attendit un moment, mais la femme restait les yeux clos, concentrée sur quelque chose, apparemment.
Imperturbable, Philippe continua :
- Je m'attendais à quelques quolibets, mais de l'indifférence, ça c'est original.
Ce n'est pas grave, je vais continuer, il y aura peut-être une question qui vous inspirera.
Essayez de ne pas vous endormir d'ici-là.
Il continua donc calmement à lui demander avec lenteur son âge, son adresse à Paris, la teneur de sa mission, son métier, le nom de son employeur, le clan de celui-ci... Pendant un temps, jusqu'à ce qu'il finisse par poser des questions complètement hors propos du genre son parfum de glace préféré, sa taille de chaussettes, son avis sur les cintres et ce qu'elle pense de l'ajout de fluor dans le sel.